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Almanda Walker-Marchand et la Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises

La plaque provinciale commémorant Almanda Walker-Marchand et la Fédération nationale des Femmes Canadiennes-Françaises a été dévoilée par la Fiducie du patrimoine ontarien et par l’Alliance des femmes de la Francophonie canadienne à l’Embassy Hotel & Suites d’Ottawa le 28 septembre 2018.

Voici le contenu de la plaque en français et en anglais :

ALMANDA WALKER-MARCHAND ET LA FÉDÉRATION DES FEMMES CANADIENNES-FRANÇAISES

    Almanda Walker-Marchand était la fondatrice et présidente de la Fédération des femmes canadiennes-françaises (FFCF). Née à Québec en 1868, elle déménagea avec sa famille tout d’abord à Montréal, puis à Ottawa. Sa dernière maison donnait sur ce parc. En 1914, quelques jours après la déclaration de la Première Guerre mondiale, Walker-Marchand encouragea un groupe de plus de 400 Franco-Canadiennes à former une organisation se consacrant à aider les soldats canadiens-français et leur famille pendant et après la guerre. De 1918 à 1945, elles contribuèrent à soulager la pauvreté, à faire avancer la santé et l’éducation et à promouvoir la culture francophone. Durant les 32 années où Walker-Marchand en assura la présidence, la FFCF s’est étendue au-delà d’Ottawa pour former de nombreuses sections régionales dans les communautés francophones partout au Canada. En 1943, Walker-Marchand a été nommée officière de l’Ordre de l’Empire britannique. Elle s’est éteinte en 1949, mais le groupe a continué pour se faire le champion des droits politiques, sociaux et économiques des femmes francophones d’un océan à l’autre. Il a célébré son 100e anniversaire en 2014, et s’appelle aujourd’hui l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne.

ALMANDA WALKER-MARCHAND AND THE FÉDÉRATION DES FEMMES CANADIENNES-FRANÇAISES

    Almanda Walker-Marchand was the founder and president of the Fédération des femmes canadiennes-françaises (FFCF). Born in Quebec City in 1868, she moved with her family first to Montreal and then to Ottawa. Her last home overlooked this park. In 1914, days after the declaration of the First World War, Walker-Marchand encouraged a group of more than 400 French-Canadian women to form an organization dedicated to helping French-Canadian soldiers and their families both during and after the war. From 1918-45 they contributed to the relief of poverty, advancement of health and education and the promotion of francophone culture. During Walker-Marchand’s 32 years as its president, the FFCF expanded beyond Ottawa to form many chapters in francophone communities across Canada. In 1943, Walker-Marchand was made an officer of the Order of the British Empire. She died in 1949, but the group continued and evolved to champion the political, social and economic rights of francophone women throughout Canada. Celebrating its 100th anniversary in 2014, it is known today as the Alliance des femmes de la francophonie canadienne.

Historique

Née dans la ville de Québec le 16 novembre 1868, Almanda Walker-Marchand est la fille de John Walker et d’Aimée-Eugénie Stanford. Parfaitement bilingue, elle connaît bien les deux cultures. Elle suit sa famille tout d’abord à Montréal, puis à Ottawa. En 1892, elle épouse un ingénieur électricien, Paul-Eugène Marchand, et avec lui, la cause franco-ontarienne1. Mère de neuf enfants, elle passe toute sa vie adulte dans le quartier Côte-de-Sable à Ottawa. Quelques mois après l’éclatement de la Première Guerre mondiale, en réponse à la femme du gouverneur général, la duchesse de Connaught, qui appelle au soutien collectif pour équiper le premier navire-hôpital canadien, Almanda Walker-Marchand réunit un groupe de femmes qui deviendra plus tard la Fédération des femmes canadiennes-françaises (FFCF)2. Almanda Walker-Marchand en devient la première présidente et son mandat durera trente-deux ans.

Le 16 août 19143, sous la tutelle de Lady Laurier, épouse de Wilfrid Laurier, un groupe de quatre cents femmes canadiennes-françaises se rassemble pour la première fois. Ce même soir, ce groupe de femmes décide de fonder une association d’aide aux victimes de guerre, aux soldats canadiens et aux actions de la Croix-Rouge. Elles apportent également leur contribution financière à hauteur de 300 dollars. En quelques jours, grâce à leurs initiatives pour récolter l’argent nécessaire à l’achèvement de la construction d’un navire-hôpital, elles parviennent à recueillir 2 500 dollars de dons4. Entre 1914 et 1918, les activités de ce groupe de femmes se diversifient, allant de la collecte de fonds pour les soldats, jusqu’à la confection de layettes et de chaussettes pour les victimes au front. Elles prennent également part à des œuvres caritatives destinées à l’effort de guerre, et notamment au fonds de secours belge et au fonds de secours français5.

Déjà organisées pour envoyer de l’aide en Europe via la Croix-Rouge, elles étendent leur assistance à d’autres victimes sur le sol canadien. Elles collectent des vêtements pour les victimes du grand incendie de 1916 dans le Nord de l’Ontario. De même, elles contribuent à la campagne de collecte de fonds en faveur des victimes de l’explosion de Halifax en 19176.

Ce groupe de femmes patriotiques canadiennes-françaises partage un autre but commun, celui de préserver la culture francophone en Ontario. Elles luttent contre le Règlement 17 qui, de 1912 à 1927, interdit l’enseignement en français après la deuxième année. Elles gardent les portes des écoles pour en éviter la fermeture et fournissent l’argent pour payer le chauffage7.

En 1917, l’organisation connue jusqu’alors sous le nom de L’Association des dames canadiennes-françaises8, sollicite et obtient, en février 1918, la délivrance de ses lettres patentes sous le nom de Fédération des femmes canadiennes-françaises. Ces lettres énoncent la mission de la Fédération autour de trois objectifs principaux, à savoir celui d’une organisation caritative et patriotique dédiée à la population canadienne-française. Il y est notamment stipulé : « s’occuper d’œuvres de bienfaisance et d’actions patriotiques de toutes sortes, et particulièrement toutes celles qui peuvent [...] améliorer le sort des soldats canadiens-français et de leurs familles, tant pendant la guerre qu’après la guerre9 » (traduction libre). Grâce à cette reconnaissance officielle, la Fédération est autorisée à étendre ses activités sur tout le territoire canadien. Au cours des années suivantes, près de vingt sections sont constituées, d’abord à Ottawa et ses environs, puis ailleurs en Ontario, dans les Prairies et en Colombie-Britannique, mais en conservant son siège et sa direction à Ottawa. L’organisation a pour devise : « Pour nos foyers ».

Avant la Grande Dépression des années 1930, la plupart des services sociaux étaient prodigués, de façon générale, par des organisations caritatives religieuses et d’autres groupes privés. En l’absence de programmes sociaux au Canada, les actions d’organismes comme la FFCF étaient essentielles au bien-être de larges pans de la population, tant au niveau national qu’au niveau de ses différentes sections. Entre 1918 et 1945, leurs nombreuses activités — bénévolat, collecte de fonds, bingo, ventes de charité et allocation de bourses — contribuent à la lutte contre la pauvreté et au progrès en matière d’éducation et de santé, mais aussi à la promotion des arts et de la culture10. Les difficultés financières causées par la Grande Dépression fournissent à la FFCF une occasion supplémentaire de se rallier pour soutenir les populations démunies des provinces des Prairies, mais également celles d’Ottawa où le nombre de sans-abri et de chômeurs a augmenté en raison de la Dépression11.

Lors du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, les membres de la Fédération s’engagent une nouvelle fois dans l’effort de guerre, sous la direction d’Almanda Walker-Marchand. Elles participent à la campagne d’emprunt de la Victoire et à la vente des obligations. Grâce à leur financement, elles réussissent aussi à acheter une ambulance militaire (portant le nom de l’organisation) pour les soldats canadiens stationnés en Angleterre. Elles viennent en aide aux enfants en distribuant des tickets de rationnement ou en collectant des fonds pour envoyer du lait aux enfants en Europe. Pendant toutes ces années, elles vont soutenir les soldats et leurs familles grâce à des dons d’argent ou de biens de première nécessité (vêtements, sucreries, nourriture)12.

En 1946, Almanda Walker-Marchand refuse de briguer un nouveau mandat à la présidence de la Fédération. Madame Agnès Gauthier lui succède. Le travail de Madame Walker-Marchand est salué par de nombreuses distinctions, et particulièrement par la décoration d’honneur décernée par le Royaume de Belgique pour son soutien aux enfants et aux mères de ce pays pendant la Première Guerre mondiale. En 1925, la Great War Veterans Association of Canada (désormais la Légion royale canadienne) lui décerne le diplôme de reconnaissance du « Dominion Command FWVA » (diplôme de reconnaissance de la Direction nationale de la Légion royale canadienne) pour son travail auprès des veuves, des malades, des vétérans et de leurs familles. D’autres décorations suivent : en 1930, le Pape Pie XI lui remet la médaille Pro Ecclesia et Pontifice. En 1943 elle est nommée officier dans l’Ordre de l’Empire britannique. Elle décède en 1949.

Jusqu’à ce jour, la Fédération a survécu à Amanda Walker, tout d’abord d’une manière similaire à celle entreprise par sa première présidente. Puis dans les décennies suivantes, l’organisation a évolué, tout comme la société qui l’entourait. Si la Constitution révisée de 1975 réaffirme le but premier de l’organisation « de promouvoir la culture française, [...] de préserver la foi catholique [...] », elle précise aussi : « les questions relatives aux femmes contribuent à leur plein épanouissement sur le plan intellectuel, culturel, spirituel, moral et physique13 » (traduction libre). La FFCF prend une direction plus politique et devient progressivement une organisation de défense des droits politiques, sociaux et économiques des femmes francophones dans les communautés minoritaires au Canada. En 1985, la FFCF devient la Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises (FNFCF). En 1989, la FNFCF comprend plus de quarante sections sur l’ensemble du territoire canadien14. En 2005, la Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises et le Réseau national d'action éducation femmes fusionnent pour former l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne. Depuis 1990, la bourse annuelle Almanda-Walker-Marchand est attribuée à une femme désireuse de reprendre ses études, en hommage à la femme à l’origine de la Fédération des femmes canadiennes-françaises.


La Fiducie du patrimoine ontarien tient à exprimer sa gratitude à Ghislain Thibault pour le travail de recherche effectué dans le cadre de la rédaction de cet article.

© Fiducie du patrimoine ontarien, 2018


1 Emilia Boivin-Allaire. Profils féminins : trente figures de proue canadiennes (Québec : Éditions Garneau, 1967), 210.

2 Album-Souvenir, Jubilé d’Or, p.9, C53/1/6, Notes historiques, s.d. 1914-1984, C53, Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises, Centre de recherche en civilisation canadienne-française, Université d’Ottawa.

3 Lucie Brunet. Almanda Walker-Marchand (1868-1949) : Une féministe franco-ontarienne de la première heure (Ottawa : Les Éditions L’Interligne, 1992), 39.

4 Lucie Brunet. Almanda Walker-Marchand (1868-1949) : Une féministe franco-ontarienne de la première heure (Ottawa : Les Éditions L’Interligne, 1992), 39.

5 Michèle Desjardins. Les femmes de la diaspora canadienne-française : brève histoire de la FNFCF de 1914 à 1991 (Ottawa : Fédération nationale des femmes canadiennes-française, 1991), 27.

6 Ibid.

7 Ibid.

8 Ibid., 26.

9 Lettres patentes 1918, Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises.

10 Pour obtenir la liste des différentes institutions avec lesquelles la FFCF était engagée, consulter Desjardins Les femmes de la diaspora canadienne-française, 35.

11 Brunet, Almanda Walker-Marchand (1868-1949), 105.

12 Desjardins, Les femmes de la diaspora canadienne-française, 30.

13 Statuts et Règlements Révisés 1964 et 1975, p.1., Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises.

14 Brunet, « La part des femmes, il faut le dire… », 13.